Zora Neale Hurston, Eslanda Goode Robeson et Katherine Dunham à l’honneur au musée du Quai Branly

par Chrystelle Ngoulou
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Zora Neale Hurston-Eslanda Goode Robeson-Katherine Dunham dans l'exposition Déborder l'anthropologie au Quai Branly

La romancière Zora Neale Hurston, la journaliste Eslanda Goode Robeson et la danseuse Katherine Dunham, trois auteures noires ayant redéfini les codes de l’anthropologie, sont mises à l’honneur dans une exposition au musée du quai Branly à Paris.

Du mardi 06 février 2024 au dimanche 12 mai 2024, l’exposition « Déborder l’anthropologie » met en lumière trois militantes noires qui ont joué un rôle important dans la lutte pour les droits civiques aux États-Unis. À travers leurs portraits, l’exposition explore une autre facette de l’anthropologie. Ces femmes ont pavé le chemin de personnalités telles que le Dr Martin Luther King ou Angela Davis. Elles ont adopté une posture différente de celle des anthropologues blancs et ont ainsi rédigé une autre histoire de cette discipline.

Zora Neale Hurston, Eslanda Goode Robeson et Katherine Dunham ont collecté des matériaux anthropologiques et les ont transformés en œuvres artistiques ou politiques. Elles ont mis leur talent à profit dans la lutte contre le colonialisme, le racisme, et pour la défense des droits des femmes au 20ᵉ siècle.

L’exposition « Déborder l’anthropologie » présente aussi des archives de terrain, des photos et des films collectés en Afrique de l’Est, dans le sud-est des États-Unis, et dans les Caraïbes, témoignant du regard singulier qu’elles portaient sur leur époque. Ces documents illustrent comment elles ont contribué à une compréhension plus profonde et nuancée de l’anthropologie.

Déborder l'anthropologieZora Neale Hurston (1891-1960) était une écrivaine, anthropologue, et figure majeure du mouvement de la Renaissance de Harlem. Elle a joué un rôle central dans la préservation et la valorisation de la culture afro-américaine à travers ses travaux ethnographiques et littéraires. Élève de Franz Boas, père de l’anthropologie américaine, Hurston a contribué à l’anthropologie des traditions orales afro-américaines, mettant ainsi en lumière la richesse de la culture noire. Son œuvre la plus connue dans ce domaine, « Mules and Men », est un recueil de folklore afro-américain qu’elle a collecté lors de ses recherches de terrain. Ce livre, publié en 1935, est considéré comme une œuvre d’anthropologie, bien qu’il se lise comme une collection d’histoires courtes.
Son travail a été réévalué et réhabilité dans les années 1970, notamment grâce à l’écrivaine Alice Walker. Zora Neale Hurston a été une pionnière de l’interdisciplinarité, mélangeant littérature, anthropologie et engagement social pour mettre en avant la culture noire américaine.

Eslanda Goode Robeson (1895-1965) était une anthropologue, auteure, actrice et militante des droits civiques américaine. Elle est surtout connue pour son livre « African Journey », publié en 1945, qui constitue sa contribution la plus significative au domaine de l’anthropologie. Dans cet ouvrage, elle appelle à l’indépendance africaine et documente ses voyages et ses observations sur le continent africain, offrant un aperçu anthropologique précieux de la vie et des cultures africaines.
Eslanda, souvent appelée « Essie », a eu un parcours de vie marqué par ses voyages en Afrique coloniale en 1936, sa présence sur les lignes de front de la guerre civile espagnole, sa participation à la réunion fondatrice des Nations Unies, ses séjours dans le Berlin occupé par les nazis, la Russie de Staline et la Chine deux mois après la révolution de Mao.
Eslanda a critiqué l’anthropologie comme discipline universitaire après l’avoir découvert cette science à Londres, auprès de Bronislaw Malinowski.

Katherine Dunham (1909-2006) était une figure emblématique dans plusieurs domaines : danse, chorégraphie, anthropologie et militantisme pour les droits civiques. Dunham a obtenu sa licence en anthropologie à l’Université de Chicago, où elle a commencé à s’intéresser à la danse et à la culture des peuples noirs d’Amérique tropicale. Elle a poursuivi ses études jusqu’au niveau du doctorat, se spécialisant dans l’anthropologie de la danse, discipline académique dans laquelle est pionnière.
Sa contribution à l’anthropologie est marquée par son approche innovante de l’étude des cultures et des rituels traditionnels des peuples caribéens et brésiliens, qu’elle a intégrée dans ses chorégraphies et enseignements. Elle a documenté ses découvertes dans plusieurs ouvrages, dont « Katherine Dunham’s Journey to Accompong » (1946), qui relate ses études anthropologiques en Jamaïque, et « Island Possessed » (1969), reflétant son expérience en Haïti et son immersion dans la religion vaudou.

L’exposition « Déborder l’anthropologie » est ouverte à tous les publics et représente une occasion unique de découvrir l’impact et l’héritage de ces trois femmes remarquables dans l’histoire de l’anthropologie et au-delà.

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